Archive for mai, 2020

Maison Ikkoku

Je viens de me lire l’intégralité du manga Maison Ikkoku de Rumiko Takahashi, dans sa première édition française que j’avais acheté il y a déjà 20 ans ! (édité par les éditions Tonkam entre décembre 2000 et janvier 2003 en 10 épais volumes, bien denses et grand format ! ) A l’époque j’avais juste lu le 1er tome, et acheté ensuite par automatisme les tomes suivants, sans avoir le temps de les lire…

Cette série connue une seconde édition en 2007, dans un format légèrement plus petit, mais respectant la pagination de la 1ere édition. Et cette année une soit disant « Perfect edition » est en cours de publication.

La mise en avant de l’œuvre de Rumiko Takahashi suite à son « sacre » au festival d’Angoulême en 2019 qui a fait d’elle la présidente de ce même festival en 2020, couplé à cette réédition que j’ai vu dans les étals de mon libraire avant le confinement, m’a donné envie de ressortir mes vieux bouquins et de m’y mettre sérieusement !

Et je dois dire que j’ai prit un plaisir fou à cette lecture, au point de me demander comment j’ai pu attendre si longtemps entre l’achat et la lecture (hormis pour le tome 1 que j’avais déjà lu il y a presque 20 ans)

Maison Ikkoku est ben connu de la génération Club Dorothée par son adaptation en série animée sous le nom français de « Juliette je t’aime ».

J’ai connu cette œuvre via cette adaptation qui est d’ailleurs très fidèle globalement bien qu’édulcorée sur bien des points (bon déjà faut se farcir la francisation des noms des personnages, mais aussi une censure notamment lors des fêtes données par les résidents de la pension où tous se saoulent à la limonade :p )

La voix française de Kyoko (Juliette) est malvenue puisque le personnage est sensé avoir la petite vingtaine d’années au début de la série et sa voix est clairement trop mature !

Je l’ai vu lors de sa première diffusion, sans réellement l’apprécier à sa juste valeur : j’avais l’age de m’intéresser qu’aux shonen pur et dur, avec moult bastons et rebondissements et des héros gamins/ado… alors les tranches de vie quotidienne de jeunes adultes, au rythme lent et mélo ça me parlait pas encore trop… et puis j’ai loupé beaucoup d’épisodes aussi, ça n’aidait pas ! Je regardais ça en patientant pour la diffusion d’un Saint Seiya ou d’un Dragon Ball

Ce fut lors des rediffusions dans les années 90, notamment dans l’émission « Recré Kid » sur TMC le dimanche matin (oui à l’époque Dorothée et sa clique me saoulaient énormément donc j’allais voir ailleurs pour ma dose d’animes), que j’ai commencé a grandement apprécier (mon coté très fleur bleue se développait a vitesse grand V avec les premiers émois amoureux, tout ça…) de plus, même si la francisation tentait de masquer l’origine de l’œuvre, c’était quand même une vitrine sur la société japonaise, sa culture, ses mœurs qui commençait à m’intéresser de plus en plus. Bref, ça n’a jamais été MA série number one, mais je l’aime beaucoup finalement en vieillissant.

C’est drôle, c’est dramatique parfois, déjanté souvent mais aussi très réaliste, bourré d’émotions ! Et le tout sublimé par le character design de Akemi Takada (qui a œuvré sur Creamy ou encore Orange Road alias Max et compagnie en VF)

Ce n’est hélas que tardivement que je découvre l’œuvre de la mangaka à l’origine de Maison Ikkoku : Rumiko Takahashi, Paradoxalement, alors que les USA l’ont édité assez tôt, il a fallu attendre les années 2000 pour qu’un éditeur français s’y intéresse ! Le trait en apparence assez simpliste (surtout au début de sa carrière sur Lamu ou les débuts de Maison Ikkoku) cache un talent monstrueux de mise en scène efficace qui apporte énormément d’émotions. Le trait ne cessera de s’améliorer au fur et à mesure de la publication de Maison Ikkoku (entre 1980 et 1987), les derniers tomes sont superbes graphiquement, plusieurs fois je suis resté scotché devant tant de beauté sur une page ! L’aspect plus réaliste de l’histoire à du jouer grandement car quand Rumiko Takahashi reviendra sur des séries plus shonen comme Ranma ½ (1987-1996) et surtout Inu-Yasha (1996-2008) et les séries suivantes, je trouve son trait moins réaliste, moins précis (ce n’est qu’un avis qui n’engage que moi).

De fait, l’histoire du manga m’a encore plus touché que son adaptation anime, l’émotion est palpable, c’est du grand art de savoir captiver son lectorat par des scènes banales de la vie quotidienne ! C’est bourré d’humour, il y a un coté déjanté qui est un peu la marque de fabrique de l’autrice, mais plus cadré que sur Lamu tout de même ! L’histoire dure 7 ans et on vit au jour le jour ces 7 années au rythme des examens annuels de Yusaku Godai, le personnage principal, étudiant un peu raté qui s’éprend de Kyoko, jeune veuve à seulement 20 ans, qui se retrouve parachutée comme concierge dans cette pension abritant de drôles de zigotos ! Le deuil pour Kyoko sera long, Godai devra être patient et contourner pas mal d’obstacles, notamment des love triangles (oui « des », pourquoi se contenter d’un seul?) qui s’installeront assez rapidement, et où clairement il n’est pas souvent à son avantage.

Chaque personnage est fouillé, complexe avec de fortes personnalités, une caractérisation prononcée pour chacun. L’humour est salvateur à bien des situations (sans ça, par moment, c’est cure de xanax garantie !)

Bref au fil de la série on ne peut que s’attacher aux personnages, même à ceux de prime abord moins sympathique : c’est avant tout une aventure humaine !

C’est le mot qui résume bien l’œuvre de l’autrice : l’humanité ! Une humanité touchante, avec ses imperfections, ses horribles défauts malgré de bonnes intentions, des sentiments purs à la base, ses joies, ses drames. La série transpire l’humanité, l’empathie de l’autrice.

Quand j’ai refermé le dernier tome, j’ai vraiment eu la larme à l’œil de devoir quitter tout ces personnages, un petit coup de blues s’est installé, un état de manque à l’idée de devoir maintenant passer à autre chose après « 7 ans » de vie en si bonne compagnie. J’aurai aimé continuer à les suivre encore quelques temps, même si cette fin n’appelle aucunement une suite, il n’y a plus d’enjeux, mais juste pour le plaisir de voir évoluer ce petit monde ,j’en aurai bien prit un ou deux tomes de plus. D’ailleurs dans le dernier tome, les enjeux ne sont déjà plus très présents, les événements coulent plus ou moins de source à ce stade, puisqu’il y a eu 80% de l’intrigue déjà résolue dans l’avant dernier tome… et pourtant le plaisir était toujours au rendez vous malgré des enjeux moindres.

L’aspect plus adulte, mature m’a surpris (y a des chapitres qui n’ont pas été adapté en dessin animé et on comprend pourquoi) mais renforce le réalisme de l’histoire et l’humanité des personnages. Du grand art tout simplement !

Mon regret est que Rumiko Takahashi n’aura plus jamais fait d’histoires ancrées dans le monde réel, hormis quelques excellents et sublimes One-shots ! Elle excelle dans ce genre d’histoires, la sensibilité qui en ressort me touche particulièrement. (bon après, ses shonen sont très bien aussi, mais ses histoires plus réalistes ont ma préférence)

 
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